18/09/1899 - Lettre de Flore Singer à Albert Ier
18/09/1899 - Lettre de Flore Singer à Albert Ier
Transcription
Neufmoutiers
Monseigneur
A peine ma lettre était-elle partie à l’adresse de votre Altesse, pour mettre mes félicitations à ses pieds, que j’ai reçu la douloureuse dépêche… Je suis toute confuse de vous écrire de nouveau et d’attirer votre attention sur ma très humble personnalité et cependant puis-je faire autrement pour n’avoir pas l’air d’une ingrate ?... Si vous saviez comme votre souvenir m’a touché à cette heure d’extrême affliction ! Vous avez pensé, Monseigneur, à ceux dont le cœur serait à l’unisson du vôtre et vous avez eu bien raison de compter sur le mien.
Il faut maintenant que je vous raconte une petite histoire ; j’avais une amie de naissance très obscure, qui me disait quelquefois : ah, que n’est-tu pauvre et misérable ! Je prie tous les soirs le bon dieu pour que tu n’ais plus de quoi vivre, oui, pour que tu sois absolument ruinée. Tu saurais du moins que je t’aime pour toi-même… » Eh bien, Monseigneur, mes sentiments pour votre Altesse ne me poussent pas jusqu’à faire des vœux si cruels, mais j’avoue que le trône où vous montez, me gêne un peu. Assez pour ajouter que je vous admire uniquement pour vos grandes facultés et que je vous aime pour la noblesse de votre caractère et pour votre rare bonté. J’écarte le reste !...
Puissiez-vous, Monseigneur, montrez du courage dans l’épreuve que vous traversez ; il m’est doux de penser qu’une main délicate et charmante vous y aidera…
Je prie une fois de plus votre Altesse de vouloir bien croire à mon très humble respect
Flore Singer
Née Ratisbonne
Mercredi le 18 Sbre
(N.B. :Le 18 septembre 1889 est bien un mercredi, proche seulement en 1895)