05/1899 - Lettre de Flore Singer à Albert Ier
05/1899 - Lettre de Flore Singer à Albert Ier
Transcription
Mai 99
Monseigneur
Je viens de me faire lire avec un intérêt que votre altesse ne saurait mettre en doute, le trop court récit, confié à la Revue de Paris.
C’est presque un poème où transparait l’attachement du conteur malgré son parti pris d’effacement.
Le drame se noue très vite ; se corse avec un personnage au premier plan, ce capitaine, vaincu du sort, acharné à l’espoir.
Les péripéties d’une chasse qui ne ressemble guère à celles que je suis en Seine-et-Marne, nous amusent en mettant en prise le roi Requin et le prince Albert ; le conflit s’apaise et le chant pur de l’oiseau, la discrète note sentimentale met au récit un plan final.
On sent dans cette langue de gentilhomme et de marin, le vent du large, la mélancolie des grands espaces et pour moi, qui le connais le charme pénétrant du conteur, la brièveté du texte est une coquetterie suprême ! l’auteur s’arrête sourit et nous quitte…au revoir !
Oui, monseigneur, au revoir dans le livre qui se mijote et dans mon salon, Dieu veuille aussi soit en allemand, soit en français que nous arrivions à un heureux dénouement de la terrible « affaire » !
Jusqu’à présent la publicité, la publicité de l’enquête n’a pas désarmé nos adversaires.
Dans les cercles à la mode, on se désabonne au Figaro, il est vrai qu’on se rattrape en l’achetant au numéro ; un sénateur me disait hier avec le plus grand sérieux que toute l’Europe, y compris les cours étrangères avaient été achetées par l’argent des Juifs.
Auriez-vous de mon or, Monseigneur ?
Ce qui est certain, c’est que vous avez ma tendresse et mon respect ; que votre altesse veuille bien en recevoir ici la sincère expression.
Flore
Mercredi
Protagonistes
Auteur
