04/1901 - Lettre de Flore Singer à Albert Ier

04/1901 - Lettre de Flore Singer à Albert Ier

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Transcription

55, avenue Kléber

(Mention avril 1901 au crayon bleu)

Oui Monseigneur,

J’ai fait bon accueil à votre lettre, vous ne pouvez pas en douter ; je lui ai fait un accueil attendri.

Je trouve si gentil de m’avoir consacré trois grandes pages, à la première éclaircie, au milieu de tant d’occupations et de fêtes frivoles et sérieuses dont la presse nous apporté l’écho.

Décidément, le rocher de la côte d’azur ne ressemble pas à tous les rochers ; il y pousse des fleurs et des fruits ; les fruits les plus rares et les plus beaux du monde, 

Puisque ce sont ceux de la science.

Moi, je n’y mords pas ; mais ce n’est pas ma faute ; c’est celle de mon impuissance.

Ici, nous avons été très occupés de la réception de Monsieur Faguet à l’Académie Française. Monsieur Emile Ollivier, qui le recevait, n’a pas lu son discours comme le font ses confrères ; il l’a dit avec art et même, avec un certain artifice, comme s’il l’avait improvisé.

C’est un véritable tour de force pour un homme de son âge ; on lui en a su gré : mais on continue à le prendre pour un bouc émissaire de la catastrophe de 1870.

 Ce que j’ai moi-même quelque peine à lui pardonner, c’est qu’ayant été victime de l’iniquité, qu’il se soit mis, dans la terrible affaire, du côté des bourreaux.

Cornély a su le dire avec cette plume qui devient, parfois, un stylet.

Quand j’ai connu Ollivier dans sa première jeunesse, je vous jure, Monseigneur, que c’était une âme d’une rare noblesse ; mais la politique pervertit tout ce qu’elle touche ; on y entre avec des convictions et on en sort avec des intérêts.

Je me rappelle qu’Ollivier dit un jour à son jeune frère : » Si tu continues à mener cette existence vulgaire tu ne fers jamais quelque chose de grand. »

« Qui te dit, réplique le frère, brave garçon, plein de candeur, que je veuille faire quelque chose de grand ?...

Ollivier, lui, a fait du grand ; mais du grand tragique.

Fernand Gouttenoire paraît très content d’une solution qui lui laisse de l’espoir.

Nous avons un temps superbe et une chaleur de juillet ; ça fait plaisir ; mais ça fait mal ; comme d’autres choses.

Ce qui me fera un bien sans mélange, c’est le retour de votre chère Altesse à laquelle j’offre l’expression d’un respect tempéré par ma sincère et profonde tendresse.

Flore

Auteur SINGER Flore
Destinataire Albert Ier de Monaco
Langue Français
Nature du document Document écrit manuscrit
Date de création 01/04/1901
Lieu(x) lié(s) France
Fiche vérifiée par Comité Albert Ier
Collection Archives et Bibliothèque du Palais princier de Monaco
Référence de la source APM C 715 - 9
Date de mise en ligne 28/04/2023

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