Lettre n°3 - Stéphanie de Hamilton au prince Albert Ier

Lettre n°3 - Stéphanie de Hamilton au prince Albert Ier

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Transcription

Stora Sundby Le 5 octobre 1889

Monseigneur !

Je vous ai écrit l’autre jour parce que vous aviez une grande douleur. Je vous écris aujourd’hui pour vous féliciter d’un grand bonheur. Mes félicitations sont aussi pour la Duchesse, car vous allez, j’en suis sûre, être un époux idéal et lui offrir un paradis comme habitation. Quant à vous-même Monseigneur vous vous semblez être sur peu sur un volcan.

Les bons jours suivent aux mauvais, et croyez-moi en voyant la Princesse, votre épouse heureuse, vous allez bien vite trouver le calme et le vrai bonheur avec une compagne, intelligente, belle et jamais, jamais regretter j’espère les temps passés, dans la solitude, s’isoler, c’est bien vite se préférer !

Pour la responsabilité du gouvernement de votre pays, avec des idées républicaines comme les vôtres, ce n’est pas difficile d’en être le Président quoique les jours se succèdent et ne se ressemblent pas, surtout de nos jours, car si nous regardons en arrière combien n'ont-ils pas apporté de bien et de mal pour l’humanité, peut être surtout sous le dernier rapport. Sans doute que de grands événements se préparent dont l’histoire parlera avec « étonnement si toutefois l’histoire elle-même continuera longtemps à parler encore. Mais ce sujet est si grand et nous savons qu’il dépend exclusivement de Celui qui a tout créé et que nous pauvres mortels nous appeler :  Notre Dieu, Notre Père, notre sauveur.

Comme c’est étrange vous vous faites vieux et e me sens chaque jour plus jeune, gaie et bien portante n’aimant plus les « Dolce farniente » d’autrefois. Les fêtes se succèdent ici et durant quelques semaines plus de cent personnes parents et amis ont été chez moi. J’ai dansé et chanté comme à vingt ans.

En relisant votre lettre, pour laquelle je vous prie d’agréer tous mes remerciements, je ne suis pas très contente, l’horizon doit être couleur de rose pour vous, si c’est un mariage d’amour et « la vie bouleversée », ne soyez pas égoïste, prenez-là pour ce qu’elle est : courte oui, mais conduisant à une éternité où tout s’expliquera d’une manière dont ici nous n’avons pas une idée claire mais des promesses auxquelles nous pouvons nous fier dans la vie et da la mort.

Si j’étais votre médecin je dirais : partez Monseigneur non pour une cure à Carlsbad, mais avec votre Hirondelle respirer l’air fortifiant de la mer.

Ai-je assez été « vieille tante » maintenant pardonnez-moi et gardez-moi malgré cela un brin d’amitié.

A la fin d’avril je compte aller à Paris y passer quelques semaines et j’espère de tout cœur avoir la joie de vous revoir et peut-être l’honneur d’être présentée à la princesse de Monaco. En attendant je vous quitte sans vous quitter.

Stéphanie de Platen

Je lis pour le moment un livre qui m’intéresse « beaucoup » Le Disciple par Paul Bourget.

 

Auteur HAMILTON (de) Stéphanie
Destinataire Albert Ier de Monaco
Langue Français
Nature du document Document écrit manuscrit
Date de création 05/10/1889
Lieu(x) lié(s) Monaco
Fiche vérifiée par Comité Albert Ier
Collection Archives et Bibliothèque du Palais princier de Monaco
Référence de la source APM - C 705
Date de mise en ligne 19/09/2024

Description

Cette lettre est la première que la comtesse adresse au prince depuis qu'il est Souverain.

Cette lettre est célèbre dans le milieu des albertiens pour son interpellation : " avec des idées républicaines comme les vôtres". Bien évidemment, le nouveau prince est attaché au régime monarchique qu'il représente (et qu'il fera évoluer vers une forme constitutionnelle en 1911), mais son humanisme, sa sociabilité politique et savante, son progressisme scientifique peuvent justifier cette expression. 

Elle est également intéressante pour son contexte : peu de temps après l'accession au trône du prince (10 septembre 1889) et peu de temps avant son mariage avec Alice Heine qui devient la princesse Alice (30 octobre). 

La comtesse fait également allusion à un roman paru cette année 1889, Le Disciple de Paul Bourget, qui se caractérise par son antirépublicanisme. 

Le Disciple Paul Bourget

Protagonistes