30/08/1902 - Lettre de Flore Singer à Albert Ier

30/08/1902 - Lettre de Flore Singer à Albert Ier

1/6
2/6
3/6
4/6
5/6
6/6

Transcription

Neufmoutiers par Tournan Seine & Marne

Monseigneur,

J’ai trouvé il y a quelques temps, dans un journal du matin des litanies qui chantaient l’Eau.
« Eau du baptême
« Eau où se mira Eve
« Eau d’où jaillit Venus
« Eau des perles
« Eau des larmes des cerfs
« Eau de fontaines,
« Eau des lacs, des montagnes, des rivières et des sources
« Eau de la Samaritaine
« Eau du rocher de Moïse
« Eau des pleurs
« Eau de la rosée
« Eau d’Ophélie
« Eau des libations
« Eau des Oasis
« Eau des Ondines, des nymphes et des naïades
« Eau des mirages
« Eau des Danaïdes

Et mille autres…

Mais j’ai regretté de ne pas y découvrir certaine autre eau.

« L’eau du prince de Monaco

Celle des océans dont vous vous êtes rendu le Maître et dont vous nous révélez les secrets dans votre beau livre.

Ce que ce livre ne pourra pas vous révéler assez, c’est vote bonté, Monseigneur !

Du sein de vos travaux vous n’avez pas refusez de laisser votre scalpel de savant pour prendre la bonne plume de l’amitié et elle m’est deux fois précieuse cette lettre ainsi reçue, toute vibrante de vos si hautes occupations.

Il est bon, croyez-le de ne pas être en ce moment sur la terre ferme. 

Et si je n’étais pas si intéressée au retour de votre chère Altesse, je vous dirai : « restez entre le ciel et l’eau ! » 

La politique nos divise plus que jamais.

Les grandes dames ont manifesté dans la rue en faveur des Sœurs. 

Je n’aime pas que les femmes se mêlent de politique ! 

Homère raconte que dans la guerre des Grecs set des troyens, Venus s’étant montrée sur le champ de bataille en sortit ensanglantée.

Mais rassurez-vous, Monseigneur, il n’y a pas eu sur la place de la Concorde le moindre sang de femme versé. 

Les belles frondeuses sont allées se consoler et caqueter sur les plages à la mode.

L’été ne nous a pas été très favorable. Ma belle-fille, envoyée au Rigi, n’a pas supporté l’air des hauteurs et Louis se souviendra des heures pénibles qu’il a traversées avec elle sur ce pic solitaire.

Ici nous n’avons jamais eu qu’un temps capricornant et je ne me réconcilierai avec le ciel de Neufmoutiers, que lorsque nous aurons eu, Monseigneur, le bonheur de vos revoir.

Ce mot vous sera-t-il expédié ? Je l’ignore ! Je l’envoie à tout hasard au Trocadéro. 

Je l’écris autant pour me satisfaire moi-même que pour témoigner à votre Altesse ma très tendre et respectueuse reconnaissance.

Flore

30 Aout 1902

Auteur SINGER Flore
Destinataire Albert Ier de Monaco
Langue Français
Nature du document Document écrit manuscrit
Date de création 30/08/1902
Lieu(x) lié(s) France
Fiche vérifiée par Comité Albert Ier
Collection Archives et Bibliothèque du Palais princier de Monaco
Référence de la source APM C 715
Date de mise en ligne 28/04/2023

Protagonistes